Lutry – Débats autour de la police intercommunale
Conseil communal du 6 décembre
La dernière séance de l’année a été marquée par les discussions autour du financement de la police intercommunale. Divisés sur la hausse des charges de l’Atoll (Association Police Lavaux), les élus ont longuement débattu avant d’adopter le budget 2026
Avant d’entrer dans le vif du sujet, le bureau du Conseil procède à l’assermentation de deux nouveaux conseillers. Garance Labbé s’est dite « très heureuse » de rejoindre une assemblée que son grand-père avait présidé il y a 65 ans. Martin Coté, quant à lui, a fait sourire la salle en précisant que son nom « s’écrit comme le côté droit et gauche ». Après cette amorce en légèreté, les élus sont entrés dans le cœur d’une séance marquée par plusieurs débats nourris.
L’Apol au cœur des débats
Avant d’entrer dans le détail, Vincent Arlettaz, président ad interim de la Commission des finances, rappelle la situation financière générale de Lutry : des recettes sous pression, un autofinancement insuffisant et un déficit d’un peu plus 3.5 millions. Il relève d’autre part les paradoxes d’un système péréquatif qui verrait, dans la situation actuelle, la Commune être privée du produit de toute contribution fiscale supplémentaire issue de ses habitants : « en d’autres termes, si un Vaudois gagne à l’Euromillions, nous avons tout intérêt à ce qu’il ne réside pas dans notre commune ».
La discussion du budget 2026 s’est rapidement concentrée sur l’augmentation du coût de fonctionnement de l’Apol. Dans ce contexte, Raymond Sudan dépose un amendement visant à revenir au montant 2025 : « L’augmentation est importante. On parlait d’environ huit à neuf millions il y a quelques années, aujourd’hui, le fonctionnement total s’élève à 12’165’000 francs », explique-t-il, proposant de ramener la contribution communale à 4’313’000 francs, au lieu des 4’651’000 prévus.
Vincent Arlettaz rappelle toutefois que la convention de 2010 oblige chaque commune à prendre en charge sa part des coûts réels. « Un amendement accepté par notre conseil ne changera pas les charges de l’Apol ». Guy Minder, conseiller communal et membre du Conseil intercommunal de l’APOL, dénonce un manque de transparence : « J’avais demandé au Comité directeur de l’Apol de voir les comptes. On m’a répondu que cela n’était pas possible ». Il déplore aussi une difficulté à exprimer publiquement les critiques : « Dans le Conseil intercommunal, il y a une sorte de silence lourd. Et lorsque l’on sort des murs, soudain on entend : “Oui, t’as raison, c’est trop cher”. À un moment, il faut assumer ce que l’on pense, ici aussi. »
La réponse de la Municipalité
Patrick Sutter, municipal en charge de la sécurité et président du Comité directeur de l’Apol, apporte des précisions : « Le passage de quatre à six unités de sécurité publique explique une grande partie de l’augmentation. Nous devons envoyer des aspirants en formation, parfois plus que prévu… Mais c’est indispensable pour maintenir un effectif stable ». Tout comme le président ad interim de la Cofin, il rappelle encore que la contribution est fixée par la convention intercommunale. La tension est palpable autour de ce chapitre du budget, à tel point que le conseiller Raymond Sudan, demande un vote à bulletin secret pour son amendement. Le résultat tombe : demande de modification du préavis refusée par 45 voix contre, 15 pour et 11 abstentions.
Règlement du port contesté
Un autre dossier sensible a émergé dans la prolongation du budget : le règlement du port et les coûts qui en découlent. Raymond Sudan s’étonne d’une ligne financière ayant apparemment doublé en deux ans et affirme que le règlement actuel génère de nombreuses frictions, tant pour les usagers que pour l’administration. Il plaide pour une révision rapide. Du côté de la Municipalité, Patrick Sutter rappelle que le règlement a été validé par le Conseil, qu’une récente proposition de modification a été largement refusée par ce même Conseil et, dès lors, qu’une modification immédiate serait injustifiée. Des explications qui ne convainquent pas totalement Guy Minder : « On se bat avec un règlement qui ne fonctionne pas et qui coûte cher. Tout le monde le dit, mais rien ne bouge depuis deux ans. »
Malgré des échanges parfois volcaniques, la présidente, Charlotte Mathis, soumet le préavis du budget 2026 au vote. Le texte est largement approuvé : 68 voix pour, trois abstentions.
Un préavis technique sur fond de crispation budgétaire
Après les débats déjà tendus autour du budget 2026, le Conseil communal s’est penché sur un préavis portant sur la transformation de l’Hôtel de police, l’aménagement du local d’exposition Dimab et la réaffectation des anciens abattoirs, trois propriétés en mains de la commune. Un crédit total de 1.9 million est sollicité pour adapter ces locaux à l’évolution des effectifs et aux exigences opérationnelles de la police intercommunale.
En plénum, c’est Guy Minder qui ouvre le feu, questionnant l’implantation même du site, non pas pour sa configuration, mais pour le coût du loyer : « Est-ce encore le lieu adéquat pour accueillir durablement la police ? » L’élu relève que le coût total du loyer après travaux est fixé à 244’960 francs par an pour l’Hôtel de police, soit une hausse de près de 60’000 francs. De l’autre côté de la route, l’APOL pourrait devenir locataire du local d’exposition Dimab. Ici, le loyer se monte à 46’000 francs par année. Guy Minder ajoute : « J’ai envie d’additionner 46’000 à 244’960 pour trouver le loyer annuel qui sera payé par l’APOL. Parce que j’aimerais comparer ce tarif au prix du marché, ou éventuellement envisager un autre lieu. Dans cette opération, j’ai le sentiment que l’APOL se fait arnaquer, et qu’il serait légitime de chercher un autre lieu pour accueillir le corps de police. »
Face à ces critiques, le municipal Patrick Sutter rappelle que l’Hôtel de police reste central pour les six communes partenaires et que les aménagements prévus répondent à des besoins immédiats : « Ces aménagements sont indispensables pour offrir des conditions de travail acceptables », précise-t-il. Les questions techniques se multiplient : coût au mètre carré jugé élevé, durée de pérennité des installations, organisation future des espaces. Toutes ces questionnements obtiennent des réponses précises de la part de la Municipalité. Malgré les réserves de certains, le préavis est finalement accepté par 44 voix, contre 12 refus et 16 abstentions.
Postulat et nouveau président de la Cofin
En début de séance, le conseiller Eugène Chollet avait déposé un postulat intitulé « Pacification des vitesses sur les routes Landar et Conversion », demandant à la Municipalité d’étudier des mesures d’apaisement du trafic sur ces axes. L’objet n’a pas convaincu suffisamment d’élus pour être renvoyé à la Municipalité.
La séance a également été marquée par l’annonce formelle de la démission de Ludovic Paschoud, président de la Commission des finances, intervenue début novembre. Pour lui succéder à cette commission, le Conseil communal a désigné Guy Wolfensberger, membre de la même formation politique. Certains commissaires avaient, dans un premier temps, exprimé leur souhait de voir Vincent Arlettaz reprendre la présidence, estimant que son engagement récent et son rôle de président ad interim en faisaient un candidat naturel. Toutefois, après plusieurs échanges, il a été rappelé que la Cofin ne peut pas proposer elle-même un candidat à sa présidence, cette compétence relevant exclusivement du plénum. C’est finalement Guy Wolfensberger qui assumera cette fonction pour la suite de la législature, sur la base d’un pacte de partis conclu en début de législature.


