Ramadan
Le ramadan a commencé la semaine dernière pour le monde musulman
Georges Pop | Il commande aux croyants dès leur puberté de s’abstenir de boire et de manger de l’aube jusqu’au coucher du soleil. Seuls les malades, les voyageurs et les femmes enceintes en sont dispensés à condition de se racheter ultérieurement par un jeûne de rattrapage. D’un strict point de vue historique (il ne saurait être question ici de croyance ou de foi), l’observance du jeûne chez les chrétiens et les musulmans tire son origine de la préexistante tradition du jeûne judaïque, elle-même issue de l’observance de privations alimentaires mystiques dans le monde mésopotamien. La pratique du jeûne est censée animer la dévotion et accorder l’esprit et le cœur au divin. Les linguistes nous apprennent que le mot ramadan est quant à lui bien antérieur à l’islam. Il dériverait d’un ancien terme sémitique qui désignait la chaleur de l’été et la sécheresse. L’origine de son usage reste controversée. Certains historiens penchent pour une interprétation religieuse et symbolique et avancent la théorie selon laquelle les anciens voyaient le ramadan brûler les pêchés, à la manière du soleil du désert desséchant le sol. D’autres y voient la survivance d’une ancienne calamité climatique : une sécheresse, considérée alors d’origine divine, aurait jadis provoqué une terrible famine obligeant les populations orientales à se rationner sévèrement ou même à se priver de nourriture. Avant même l’éclosion de l’islam, ramadan désignait le 9e mois d’un calendrier fondé sur une année de douze mois lunaires, plus courte de onze jours que l’année solaire aujourd’hui universellement reconnue ; raison pour laquelle la date du ramadan ne tombe jamais à une date fixe mais dépend de l’observation de la lune. Selon les fidèles de l’islam, c’est au cours d’une des nuits du ramanda que l’archange Gabriel, révéré comme le messager de Dieu par les trois grandes religions monothéistes, a révélé au Prophète les préceptes du Coran ; ce qui en fait pour eux la nuit la plus bénie d’entre toutes. Pas question pour un musulman, en terre d’Islam, de manger, boire ou fumer en public pendant le jeûne : l’année dernière quatre Tunisiens ont été condamnés à un mois de prison pour avoir pique-niqué dans un jardin public en plein ramadan. Il y a quelques jours un collectif tunisien d’associations de défense des droits humains a d’ailleurs appelé le gouvernement à respecter la liberté de conscience de chaque individu, conformément à la constitution. Mais les autorités craignent la colère des adeptes d’une pratique rigoriste. Si, lors du ramadan, la continence est de rigueur pendant la journée, la rupture du jeûne donne souvent l’occasion le soir à de joyeuses ripailles. Pendant le ramadan, dans certains pays musulmans, les achats de nourriture passent, statistiquement, du simple au double. Et chaque année, la presse, au Caire, à Casablanca ou à Dakar, se désole d’une poussée peu vertueuse de la prostitution durant la période du jeûne. Ramadan nous a donné en français le mot ramdam, héritage des temps coloniaux. Au 19e siècle les soldats français déployés en Afrique du Nord étaient agacés par le tintamarre des convives réunis pour gueuletonner à chaque rupture du jeûne. C’est ainsi que ramdam, alias ramadan, est devenu synonyme de tapage !