La chronique de Denis Pittet
L’affaire Dittli et l’affaire Veillon

On compare beaucoup l’affaire Dittli à l’affaire Maudet. Non sans raison. Mais aujourd’hui, nous allons évoquer le mois de mars 1996 dans le canton de Vaud. Qui se souvient encore des opérations « Orchidée » menées entre 1993 et 1997 ? Sans entrer dans les détails, il s’agissait de mener de violentes opérations d’économies qui touchaient alors les Hospices cantonaux et le CHUV (déjà) ainsi que l’ensemble de l’administration cantonale. En juillet 1995, les comptes de l’Etat de Vaud sont publiés avec retard (normalement c’est début avril) et font apparaître un déficit de 526 millions de francs. Il est le plus élevé de tous les cantons suisses. Le 30 novembre de la même année, plus de 10’000 fonctionnaires descendent dans la rue pour dire leur colère contre les coupes ou la non-indexation des salaires depuis 1993. C’est dans ce contexte aussi tendu que compliqué que vont surgir des événements dont les noms vont vous dire quelque chose : le 7 février 1995, le Conseil d’Etat tient une conférence de presse pour dénoncer de graves dysfonctionnements au… département des finances. C’est le scandale du logiciel Procofiev et le licenciement du chef de service de l’administration des finances, qui a dissimulé un montant de 106 millions. L’affaire Buffat. Qui va entrainer l’affaire Veillon, chef du département des finances depuis novembre 1991.
En février 1996, le député Troillet révèle en pleine séance du Grand Conseil ce qui s’appellera le scandale des Pampers de Bossard Consultants. L’entreprise parisienne a été appelée au chevet de l’Etat pour scruter son administration et son fonctionnement. Des employés indélicats de Bossard ont mis sur leurs notes de frais l’achat de couches… mais aussi des produits cosmétiques ou de bonnes bouteilles. Il y en a pour plus d’un million pour l’année 1995 ! Imaginez l’ambiance dans le contexte d’alors. Le canton prend feu.
Dans une ambiance de fin du monde, le Conseil d’Etat in corpore est acculé et sur la sellette. Syndicat, gauche et de nombreuses autres voix demandent la démission du gouvernement, qualifié « d’irresponsable » par le POP. Les choses vont aller vite. Les sept conseillers d’Etat (Ruey, Veillon, Schmutz, Favre, Martin, Biéler, Schwaab) sont sommés de s’expliquer. Acculé, le Conseil d’Etat demande une semaine de réflexion. Et un homme va se retrouver seul face aux autres : l’UDC Pierre-François Veillon. Le 7 mars 1996, l’homme est bouté hors son département et reprend la Justice. Mais rien ne se calme, au contraire. Le 18 mars, Le Matin titre « Veillon démissionné » ! L’homme quitte le gouvernement avec effet immédiat. Le fusible a sauté. Et Veillon déclare : « D’anciennes et graves négligences (…) sont apparues dans la gestion des finances de l’Etat. Elles ne sont pas de mon fait. Elles remontent le plus souvent à des périodes où je n’étais même pas Conseiller d’Etat ». A la fin du mois de mars 1996, un sondage révèle que 8 Vaudois sur 10 ne font plus confiance au Conseil d’Etat.
Et c’est ici que l’on doit conclure avec cette fameuse formule : « Toute ressemblances avec des personnes existantes ou ayant existé est purement fortuite et involontaire ».