« On the Milky road » – Moi, moi et moi
«On the Milky Road» fiction d’Emir Kusturica.
Colette Ramsauer | «C’est la première et la dernière fois que je me mets en scène, c’est vraiment trop compliqué. Je vénère encore plus Charlie Chaplin depuis» reconnaissait le cinéaste franco-serbe Emir Kusturica à la sortie de son dernier film On the Milky Road dans lequel il tient le rôle principal et maîtrise le scénario à partir d’histoires vraies, puisant dans une imagination déjantée. Et présentant un étonnant bestiaire.
Réalité crue + poésie
Kosta, (Emir Kusturica) fauconnier, porteur de lait à l’esprit simpliste, est on ne peut plus original. A dos d’âne, se protégeant comme il peut, il achemine quotidiennement la précieuse boisson sous le feu des balles, aux soldats justement, avec pour toile de fond la campagne de Serbie en guerre des années 90. Violence ma foi, édulcorée par l’imaginaire qui rallie réalité crue et poésie, dans un monde de petites gens cher à Emir Kusturica, dans des scènes burlesques pour se moquer de l’absurdité de la guerre ou autour de la mécanique d’une horloge austro-hongroise dans une gare réaffectée où squattent des marginaux. Un monde de saltimbanques fellinien, pour lequel le réalisateur n’hésite pas à faire appel à doublure d’acrobate ou dompteur d’ours.
Beauté italianissime
Dans sa routine de livreur de lait, Kosta nourrit chaque jour de quelques golées une vipère géante qui le guette au bord du chemin, quotidien qui prend fin lorsqu’il tombe amoureux d’une beauté italianissime en fuite, Nevesta (Monica Belluci). Débute alors un enchaînement de situations invraisemblables pour le couple rejeté et poursuivi. Des scènes qui nous emmènent dans des paysages grandioses de montagnes et de cascades de Serbie. Magnifiques!
«J’aime les animaux»
L’espèce animale est omniprésente. Le réalisateur affirme sur You tube (On the Milky Road 11. 07. 2017): «J’aime les animaux, leur rapport à la nourriture, leur comportement spontané. Je suis heureux qu’ils aient presque tous rejoint mon réseau d’émotion». Pourtant le doute plane lourdement quant au respect des espèces durant le tournage. Quel réseau d’émotion ont rejoint des oies affolées contraintes de prendre un bain de sang, et les ovins d’un troupeau explosés sur un champ de mines?
Dans le contexte actuel de sensibilité accrue envers nos amis les animaux, le cinéaste célèbre pour Papa est en voyage d’affaire 1985, Le Temps des Gitans 1988 ou Underground 1995, risque bien de perdre de sa crédibilité. Après le dernier long métrage de fiction Promets-moi 2007, On the Milky Road assure néanmoins de distraire tant déborde l’imagination du cinéaste et étonne son rôle d’acteur chaplinien.
On the Milky Road
Fiction, d’Emir Kusturica, Serbie-Angleterre-USA, 2016, 125’, vo-st, 16/16 ans avec Emir Kusturica, Monica Belluci, Sloboda Micalovic, Predrag Manojlovic
Au cinéma d’Oron les samedi 2 et lundi 4 septembre à 20h (salle 2) ainsi que le dimanche 3 septembre à 18h (salle 2)