Exposition – Une belle rétrospective consacrée au peintre Auguste Veillon
Lacs et montagnes suisses, fleuve Nil et désert au Musée d’art de Pully, jusqu’au 18 juin
Le Musée d’art de Pully a choisi de présenter un artiste du XIXe siècle un peu oublié, le natif de Bex Auguste Veillon (1834-1890). Disons-le d’emblée, il ne fut pas un génie de la peinture, ni ne brilla par son audace. C’est typiquement ce qu’on appelle un « petit maître », bénéficiant cependant d’une solide technique picturale, et dont les toiles sont souvent fort belles. Elles séduiront un large public, si l’on en juge par la foule présente à l’exposition le jour de notre visite.
Auguste Veillon, un artiste du XIXe siècle
La présentation est en deux parties. La première est dévolue aux œuvres réalisées suisses. Dans notre pays, Auguste Veillon a essentiellement peint des lacs et des montagnes. Ces dernières constituaient un facteur d’unification et d’identification dans la Suisse moderne, née de la Constitution fédérale de 1848. Sans être extrêmement original, l’artiste a composé de belles toiles dans l’Oberland bernois, en Engadine, ou encore sur les bords du lac Léman, et cela dans des formats divers, les plus intéressants étant souvent les plus petits. Les sommets enneigés sous un ciel d’azur, ainsi que les lacs où se reflètent les voiles latines de nos barques, sont traités avec des couleurs douces, en mineur. Au contraire de François Bocion, où apparaissent, sur fond de crépuscules sanglants, des bateaux à vapeur, Auguste Veillon élimine tous les signes de modernité. De manière un peu passéiste, il peint une Suisse alpestre fidèle à notre mythologie nationale. On remarquera l’importance qu’il accorde à l’eau. Ses cadrages, toujours originaux, laissent à cette dernière une place plus ou moins importante. L’élément le plus moderne dans ses toiles est sans doute son traitement des feuillages frémissants, qui font songer à Camille Corot. Une mention pour son tableau intitulé La Handegg, dans l’Oberland bernois, ainsi que pour le très séduisant Matin à Clarens.
De Venise et Naples, Veillon a laissé des vues où la nature, les eaux, l’emportent sur la représentation des monuments. Le ciel brumeux de la lagune nous rappelle l’atmosphère des romans policiers vénitiens de Donna Léon…
C’est la suite de l’exposition qui est la plus originale, bien qu’elle relève d’un genre très prisé à l’époque, l’orientalisme, notamment dans la représentation de l’Egypte. Auguste Veillon a beaucoup voyagé à travers le monde arabe, en Tunisie, à Damas, en Terre sainte, et surtout le long du Nil. Loin de rechercher des motifs « pittoresques », il s’est surtout intéressé à la nature. En témoignent de magnifiques couchers de soleil sur le fleuve, avec des dégradés de rouges crépusculaires. Les êtres humains sont presque absents de ses tableaux, ou alors statiques, contemplant le paysage, telle La porteuse d’eau devant Philae, un célèbre temple pharaonique, relégué un peu dans le lointain.
En Terre sainte, qui faisait alors partie de l’Empire ottoman, Auguste Veillon a peint des tableaux où règne une ambiance « biblique », cependant beaucoup moins prégnante que dans les toiles très protestantes d’Eugène Burnand. On remarquera particulièrement les Murailles de Jérusalem, vues de manière panoramique, à contre-jour, comme on les aperçoit depuis le Jardin des Oliviers, avec un premier plan de noirs cyprès, qui confèrent au tableau une atmosphère tragique. L’artiste peint aussi le désert où, dans l’immensité nue, on voit de loin des Bédouins et leurs tentes, sans préoccupation ethnographique ou « couleur locale ». Ce qui séduit Auguste Veillon, c’est toujours l’ambiance, les variations de la lumière et ses reflets sur les eaux. L’exposition pulliérane nous offre donc la belle découverte d’un artiste méconnu !
« Auguste Veillon. Voyages au fil de l’eau »
Musée d’art de Pully , jusqu’au 18 juin