Exposition – Le renouveau artistique au tournant des XIXe et XXe siècles
Le Palais Lumière à Evian illustre toute une époque. A voir jusqu’au 4 janvier 2026
Même si on n’y trouve pas pléthore de noms célèbres (et pourtant… Toulouse-Lautrec, Steinlen et Eugène Grasset sont bien présents), voici une riche exposition qui rassemble près de 400 œuvres, issues d’une collection privée qui en compte 25’000.
Il s’agit de peintures, aquarelles, dessins, estampes, livres et revues illustrées. Toutes ces pièces sont représentatives de ladite « Belle Epoque », qui précéda la boucherie de 1914-1918. Avec d’abord l’influence du Japonisme, très en vogue à partir de l’ère Meiji (l’ouverture au monde du Japon dès 1868). En témoignent des tableaux tels Madame Chrysanthème d’Auguste-Ferdinand-Marie Gorguet ou Vue du Mont Fuji inspiré par les fameuses estampes de Hokusai. Ce Japonisme a beaucoup influencé l’Art Nouveau, célèbre et popularisé par ses représentations de femmes-fleurs, ses courbes, ses volutes et ses lettrines aisément reconnaissables. Remarquons en passant que les cadres des tableaux, parfois en bois sculpté, présentent par eux-mêmes un intérêt esthétique, comme on le voit autour de la toile Liane de Pougy sur un fond d’hortensias.
Les deux décennies concernées sont marquées par l’apogée des cabarets de Montmartre, où vient s’encanailler la bonne société : le Chat Noir, fréquenté entre autres par Zola, Ravel, Jules Verne et nombre de têtes couronnées. Mais aussi le Moulin Rouge ou les Ambassadeurs. L’époque est aux cafés, aux spectacles, au théâtre, aux bals, au cirque, à la fête, en un mot à l’amusement, jusqu’au cataclysme de la Première Guerre mondiale. Mais Maximilien Luce, qui avait le cœur très à gauche, nous rappelle, par ses lithographies aux sujets révolutionnaires, que l’époque n’était pas joyeuse pour toutes les classes sociales…
Les Nabis, avec leur goût pour les couleurs vives, sont très représentatifs de ce temps. Mais aussi les Symbolistes qui, par une sorte de réaction poétique et spirituelle, souvent teintée de mysticisme, se distancient de la révolution industrielle et d’un monde de plus en plus technologique.
La Bretagne, et pas seulement Pont-Aven où règnent Gauguin et Paul Sérusier, connaît une nouvelle mode. Douarnenez et Concarneau sont souvent les sujets de tableaux.
On découvre aussi, grâce à cette exposition, le groupe belge des Vingt (1883-1893), en relation avec l’avant-garde parisienne. Théo van Rysselberghe en est un peu le chef de file. Enfin, la dernière salle expose des portraits de figures importantes de ce temps, parfois oubliées aujourd’hui, alors que d’autres, comme l’écrivain Pierre Loti, nous parlent encore. A noter que les artistes présentés ici appartiennent presque tous à une même génération, née sous le Second Empire et disparue dans les années vingt et trente. Ce qui concourt à la belle unité de cette exposition qui, plutôt que de mettre en avant des personnalités, illustre remarquablement l’esprit novateur de toute une époque d’effervescence artistique. Et pour celles et ceux qui ne le connaissent pas encore, le bâtiment du Palais Lumière lui-même constitue une fleuron de l’architecture des villes d’eaux du début du XXe siècle.
« Paris-Bruxelles 1880-1914 »,
Palais Lumière, Evian-les Bains,
jusqu’au 4 janvier 2026.