Depuis 2016, l’électricité fournie par les Services industriels (SI) de Lutry est entièrement renouvelable et d’origine suisse. Mais entre gestion des surplus solaires, modernisation du réseau et prix d’achat de l’énergie, les défis ne manquent pas pour assurer un approvisionnement stable et durable. Explications.

Le canton de Vaud compte 19 Gestionnaires de réseau de distribution (GRD). Pour garantir leur transparence, ces derniers sont contrôlés par la DGE-SIREN, un service de l’État. Ils ne peuvent pas s’étendre au-delà de leur zone de desserte et doivent assurer l’entretien de leurs infrastructures. À Lutry, le réseau électrique comprend 50 stations de transformation et 86 km de câbles (moyenne et basse tension). Ici, la quasi-totalité du réseau est souterrain, à l’exception de quelques lignes aériennes sur les hauts de la commune.

Le modèle d’approvisionnement de Lutry est similaire à celui d’autres « petits GRD ». Plutôt que d’acheter son électricité directement sur le marché européen, la commune se fournit via la capitale vaudoise : « Nous faisons partie du pool d’acquisition des SI de Lausanne », explique Charles Monod, syndic de Lutry. « Cette manière de faire permet d’obtenir des conditions avantageuses et de ne pas subir les fluctuations des marchés boursiers ». En 2024, le prix moyen de l’électricité à Lutry était de 38,17 centimes par kilowattheure, soit dans la moyenne cantonale.

Production et enjeux du solaire

Depuis 2016, Lutry garantit une énergie 100 % renouvelable grâce aux garanties d’origine, un mécanisme de traçabilité certifiant qu’une quantité d’électricité donnée provient bien d’une source renouvelable. Aujourd’hui, la commune compte 440 installations photovoltaïques, qui produisent environ 4,3 GWh par an. Les SI rachètent 2,7 GWh de cette production aux particuliers qui possèdent, pour la plupart, des panneaux solaires sur leur toiture, mais l’injection d’énergie dans le réseau pose parfois des défis. « Les infrastructures ont été pensées pour la consommation, pas forcément pour travailler dans le sens inverse », souligne le responsable des SI. En d’autres termes, les capacités du réseau peuvent être insuffisantes pour absorber ces apports. En été par exemple, la production est élevée et la consommation moindre, il est alors nécessaire de limiter le flux d’énergie afin de ne pas endommager le réseau.

Du côté des compteurs intelligents, les fameux smart meters, ils équiperont 80 % des compteurs de la commune d’ici 2027. Ces boitiers permettent un suivi plus précis des consommations et des productions. Par ailleurs, Lutry dispose d’une installation de biométhanisation à la station d’épuration (STEP), qui produit de l’électricité à partir des boues d’épuration, contribuant ainsi à la diversité des sources énergétiques locales.

Impacts de la nouvelle loi sur l’approvisionnement énergétique

L’évolution du cadre législatif joue également un rôle clé dans le prix de l’énergie. Accepté par le peuple le 9 juin 2024, la nouvelle loi fédérale sur l’énergie impose des adaptations aux GRD et influence le prix de rachat : « Dès l’année prochaine, les garanties d’origines seront trimestrielles. Cela impactera le tarif d’achat par les GRD et il faudra s’attendre à une diminution du prix de rachat par nos services de l’énergie excédentaire », informe Charles Monod. Il précise toutefois que les SI de Lutry feront leur possible pour limiter l’impact sur les propriétaires : « Nous ne rachèterons en principe pas en dessous de 6 centimes, mais si l’on regarde ce que font d’autres fournisseurs d’énergie, il y a peu de chances que l’on dépasse les 10 centimes. C’est vrai que cela peut paraître un peu cruel pour ceux qui ont investi dans une installation solaire, mais cette modification de la loi faisait partie du programme de la votation du 9 juin dernier. »