Elections communales 2026
La tentation indépendante gagne les Conseils communaux
Dans plusieurs communes du district passées au système proportionnel, une tendance se confirme: toujours plus de candidats délaissent les partis traditionnels pour se présenter sous une bannière indépendante. Sans dresser une liste exhaustive des personnes en lice pour 2026, cet article s’intéresse à ce phénomène qui redessine le paysage politique de proximité. A Bourg-en-Lavaux, Oron, Savigny ou Belmont, l’engagement se veut moins partisan et davantage centré sur la liberté de vote.

Le cas du Groupement indépendant d’Oron (Grindor), qui fête souffle ses dix bougies, illustre bien ce virage. Né en 2015 lorsque la nouvelle loi cantonale imposa le système proportionnel aux communes de plus de 3’000 habitants. « Nous ne voulions pas devoir suivre des injonctions venues d’un parti plus large », résume son président, Florian Meyer. Grindor réunit des élus qui souhaitent débattre librement des objets communaux, sans se couler dans un cadre gauche-droite.
Malgré les doutes de certains qu’en à la survie du groupement indépendant, le mouvement repose toujours sur une charte de valeurs : culture du débat, respect des opinions, esprit de groupe et liberté de vote totale. Les sensibilités y sont variées, souvent qualifiées de « centriste au sillon très large ». Certains se reconnaissent plutôt dans la droite, d’autres dans des approches plus sociales, mais les votes se décident dossier par dossier. « On n’est pas là pour rejouer les guerres partisanes, mais pour répondre au bien commun des citoyennes et des citoyens d’Oron », souligne Florian Meyer. Grindor revendique avoir déjà influencé plusieurs objets, notamment économiques, sociaux ou touristiques, en faisant parfois basculer la majorité.
A Savigny, une entente née pour « penser aussi local »
L’Entente savignolane, fondée début septembre par Alain Perreten et deux autres membres du Conseil communal, s’inscrit dans cette même prise de distance avec les appareils partisans. L’objectif : offrir un cadre aux personnes souhaitant s’engager sans devoir s’aligner sur une ligne cantonale ou nationale. « L’essentiel, pour une commune, c’est de pouvoir penser local », affirme son fondateur. Selon lui, appartenir à un parti classique signifie admettre des injonctions ou des positions émanant d’instances supérieures, ce qui peut réduire la liberté et l’indépendance de choix. « A l’extérieur, on vient souvent te dire que, parce que tu es dans tel parti, tu soutiens forcément telle position. Ce n’est pas le cas avec un groupement indépendant. »
L’Entente savignolane attire déjà une bonne dizaine de personnes, dont certaines n’auraient pas franchi le pas sous une bannière partisane. Le mouvement espère également aussi rajeunir le Conseil communal : « On veut ouvrir la porte à une génération plus proche des habitants d’aujourd’hui, pas seulement aux ‘anciens’ ». Depuis septembre, plusieurs habitants ont manifesté leur intérêt, même si certains hésitent encore, notamment par crainte du regard de leur entourage ou de leur parti d’origine.
Une tendance qui gagne aussi l’exécutif
La tendance touche également les municipalités. A Bourg-en-Lavaux, par exemple, Véronique Addor se lance en indépendante pour les élections de mars. A 63 ans, elle explique n’avoir jamais trouvé un parti politique correspondant réellement à ses valeurs, préférant « voter selon le bon sens citoyen ». Si Véronique a baigné dans le monde politique depuis son jeune âge, elle n’a pourtant jamais suivi les traces familiales, alors que son frère, Jean-Luc Addor, siège au Conseil national et que son cousin est syndic dans le district.
Son engagement s’est affirmé lors des démarches autour de la taxe déchets verts, où, en tant que membre pétitionnaire, puis de l’initiative, elle dit avoir été frappée par les nombreux témoignages de citoyens exprimant leur frustration ou leurs difficultés : « Cette immersion dans les préoccupations réelles des habitants a été déterminante », confie-t-elle. Déçue par la manière dont la municipalité a géré ce dossier, elle souhaite désormais apporter davantage d’efficacité, de coordination et une forme de gouvernance plus collégiale. « Pour moi, la réduction du collège municipal à cinq membres au lieu de sept actuellement, représente une occasion de repenser les processus internes et de renforcer la communication avec la population. »
A Belmont, des partis qui s’essoufflent face aux indépendants
La trajectoire de Belmont-sur-Lausanne montre aussi la force des listes locales. En 2016, lorsque la commune dépasse les 3000 habitants, elle doit adopter le système proportionnel. Plutôt que de se répartir entre PLR, socialistes ou autres formations, les élus créent une liste d’entente : les Cancoires indépendants de Belmont (CIB). Lors du premier scrutin, cette unique liste remporte l’ensemble des sièges, y compris ceux de la Municipalité. « L’arrivée de partis traditionnels en 2021, notamment les Verts et l’UDC, n’a pas fondamentalement changé la donne », se souvient le municipal Jean-Claude Favre. Malgré une percée initiale, ces formations ont été confrontées à un manque de forces vives, à la mobilité des jeunes engagés et à la charge que représentent les commissions. « Beaucoup se sont rendu compte qu’ils n’avaient pas l’énergie de repartir pour une nouvelle législature », résume-t-il.
Certains élus verts ont finalement rejoint les CIB, et plusieurs partis renoncent à déposer une liste en 2026. Les indépendants restent majoritaires, même si une nouvelle alliance Vert’libéraux – Centre se constitue pour offrir une alternative à la population et renforcer la visibilité de ces partis en vue des élections de mars. Pour Jean-Claude Favre, cela s’explique par la nature des dossiers traités : « Au Communal, on parle parascolaire, aménagement du territoire, mobilité, finances locales. Beaucoup de gens ne souhaitent pas s’identifier à une idéologie cantonale ou nationale pour gérer des questions très concrètes. »
Vers un nouvel équilibre politique ?
De Grindor à l’Entente savignolane, en passant par les Cancoires indépendants, un mouvement se dessine : l’engagement communal. Si les partis conventionnels ne sont plus la porte d’entrée évidente pour celles et ceux qui souhaitent se lancer, chacun a jusqu’au 12 janvier prochain pour briguer un siège au Conseil communal de sa localité.
Le système proportionnel, souvent critiqué, impose la formation de listes, mais il ouvre aussi un espace à des mouvements locaux qui revendiquent l’autonomie, le pragmatisme et une liberté de vote élargie. A l’approche des élections de 2026, la politique communale du district se recompose autour de ces groupes indépendants, où l’étiquette compte moins que l’implication personnelle et le lien avec la population.


