Cinéma de Chexbres – Pour l’amour du 7e art au cinéma
L’histoire
Valentine Krauer | Il était une fois une salle communale qui, à l’aube de ses vingt-quatre ans, rencontra des amoureux du 7e art. C’était en 1952. En-dehors des réunions et des spectacles locaux, la grande salle de Chexbres allait se transformer en cinéma! Léon Moser, déjà responsable des cinémas de Vevey et de La Tour-de-Peilz décidera de la programmation, jusqu’à ce que Roger Légeret et Jacques Lebet reprennent le poste six ans plus tard. En 1970, l’instituteur Jean Chevalley reprend le flambeau, choisissant dès lors de diffuser les films en version originale sous-titrée, accompagnés d’une fiche de présentation. Erik Pache prendra sa suite vingt ans plus tard, suivant avec passion l’état d’esprit de son prédécesseur. Le cinéma est alors connu pour ses films de qualité, souvent échappés des sentiers battus. A partir de l’an 2000, Danièle Wenger verra les grands changements liés à l’avancée fulgurante de la technologie. Les temps changent, le cinéma de Chexbres s’adapte! Les bandes-annonces des films sont désormais visibles sur son site internet et il fait face à la mort du 35mm avec l’achat d’un projecteur numérique qui marquera l’année de ses soixante ans.
Mais comment ça tourne ?
La première et dernière augmentation du prix des places date de la numérisation imposée, où, de Fr. 5.- le billet a passé à Fr. 8.-! Mais comment font-ils? La réponse se trouve dans le temps qu’une trentaine de bénévoles donnent à ce projet. Des projectionnistes, des ouvreurs/ouvreuses, des caissiers/caissières, une programmatrice et ses assistants, des responsables médias… tout le monde offre ses heures. Associé au fait que la commune de Chexbres met la salle à disposition sans contrepartie financière et que l’association bénéficie des dons de ses amis, le cinéma peut s’offrir les films, vendus moins chers après avoir passé dans les salles traditionnelles. Voilà! «Ça tourne!» Et même avec du numérique!
La programmation
Danièle Wenger s’entoure de deux assistants, rendant ainsi le choix encore plus varié. Aujourd’hui, le cinéma de Chexbres diffuse des films récents venant d’une multitude d’horizons, comme l’atteste le programme de ce mois de janvier, qui nous fait voyager en Grande-Bretagne avec Ken Loach, aux Etats-Unis avec Woody Allen ou Todd Phillips mais également en France, en Belgique, en Algérie, en Syrie et jusqu’en République Centrafricaine. Par respect pour les comédiens et les réalisateurs, tous les films sont encore diffusés en v.o. sous-titrés. Certains jours, les bénévoles donnent un morceau supplémentaire de leur temps pour organiser des activités en lien avec le film. Ainsi, l’an passé, un cours de yoga avait été offert à la fin du film «Debout» de Stéphane Haskell. Il collabore également avec l’association «Ciné-Doc», une organisation fondée à la Vallée de Joux qui propose la diffusion unique de documentaires d’auteur, peu ou pas représentés (www.cinedoc.ch). Les projections sont parfois accompagnées d’un débat avec l’auteur ou des personnes concernées par le sujet. Régulièrement des films d’animation pour les plus petits sont proposés, parfois accompagnés d’un goûter. Une occasion de faire découvrir aux plus jeunes que le cinéma peut être «trop cool» même sans 3D et sans pop-corn!
Une nouvelle programmatrice
Après vingt ans, Danièle Wenger a décidé de passer le témoin à une des assistantes de programmation, une jeune éducatrice de rue lausannoise, Sandra Stimoli. Sandra a vécu quelques années à Chexbres et s’est laissée séduire par ce petit cinéma hors-norme, qui met l’amour du 7e art en priorité, bien avant la quête du bénéfice, ce qui de nos jours est une denrée rare. Des étoiles plein les yeux, Sandra évoque sa passion du cinéma qui lui vient très probablement de son père, lui même grand amateur des salles obscures. Evidemment, les styles ont évolué. Alors qu’il lui faisait découvrir Clint Eastwood, encore taiseux dans les westerns des années soixante ou Totò, acteur désormais oublié, dans des films italiens en noir et blanc, Sandra se plonge aujourd’hui dans l’univers de Pedro Almodovar et s’enthousiasme pour des découvertes venues de loin, comme le tout récent succès sud-coréen «Parasite». Sandra s’étonne avec bonheur de cette opportunité qui lui est donnée de mettre sa passion au profit de cet irréductible cinéma de village qui survit à toutes les globalisations, numérisations et autres travers de la consommation.
Programme sur: www.cinechexbres.ch (possibilité de s’inscrire à la «newsletter»)
Séances: mardi, mercredi, et vendredi, samedi à 20h30 + séances spéciales
Prix des places : Fr. 8.– Transports : nouvelles possibilités de rejoindre Vevey en train après le film (dernier train : 23h34)