Milka  |  Impressionnant! C’est le mot qui convient pour décrire la façon dont cette nounou a tissé sa toile, patiemment, petit-à-petit, elle a su conquérir tout le monde, endormir tout le monde, se rendre si indispensable tout en se rendant invisible. Et elle est restée là. À l’affut, comme une prédatrice! Myriam, mère de deux jeunes enfants, décide, malgré les réticences de son mari, de se remettre à travailler au sein d’un cabinet d’avocats. Mais il y a certains problèmes à régler d’urgence, comme la garde des enfants. Ils se mettent en quête de la nounou idéale et après un casting sévère, tombent sur la perle rare. Cette nounou, Louise, va immédiatement se faire aimer de toute la famille. Femme d’intérieur, très douce avec les enfants, ne comptant pas ses heures, elle met en place petit-à-petit une dépendance qui devient mutuelle. Le couple décide même de l’emmener en vacances avec eux. Les enfants l’adorent, le couple se repose entièrement sur elle, ses talents de cuisinière font qu’elle organise un repas hebdomadaire pour les amis de ses patrons. Une perle! Mais tout ce qui brille n’est pas or et elle va bientôt montrer son vrai visage. Cela commence par des petites remarques sur les habitudes de sa patronne, puis des initiatives, une attitude face aux remontrances qui laissent à penser qu’elle a définitivement pris le pouvoir. Jusqu’à commettre l’irréparable.

Le suspense est haletant, l’écriture bien ficelée, on accroche dès les premières pages. On sait d’entrée ce qui est arrivé, mais l’auteure va développer la mise en place de cette toile d’araignée et va nous amener à essayer de comprendre pourquoi elle en est arrivée là. C’est vraiment un très bon roman, qui a d’ailleurs décroché le prix Goncourt amplement mérité. C’est aussi une description très précise de notre époque à travers les personnages du couple et de la nounou, avec sa conception de l’amour et de l’éducation, des rapports de domination et d’argent, des préjugés, des différences de classes et de culture. Leila Slimani est née en 1981, comme quoi il n’est pas nécessaire d’être vieux pour maîtriser l’écriture. Elle est l’auteure d’un premier roman très remarqué, «Dans le jardin de l’ogre», paru en 2014. Mais ce deuxième est simplement une pépite. Après quelques pages, vous ne pourrez plus le lâcher.