Alea jacta est
Petite interjection que Jules César lança avant son passage du Rubicon en direction de Rome en 49 avant J.-C. Ce fleuve représentait une limite que le Sénat romain avait délimité et déclaré sacrilège de franchir en armes. Le proconsul et général, à la tête de ses légions, le franchit tout de même, repris Rome et renversa Pompée. Il se forgea l’image qu’on lui reconnaît encore aujourd’hui, celui d’un grand dirigeant, bâtisseur d’empire mais aussi celui d’un stratège démagogue et de dictateur. Nous sommes toujours plus intelligents après, dit-on. Mais l’Histoire bégaie et continuera sans doute à bégayer tant que le pouvoir continuera à dévorer ses enfants. Elle devrait pourtant servir d’enseignement en proposant ces modèles qui ont été testés dans les faits et qui forment notre passé… L’amnésie récurrente laisse la porte entrouverte à ces personnages qui au XXIe siècle sont devenus légions. Les exemples ne manquent pas. Ils font partie des nouvelles quotidiennes, des millions de suiveurs s’en revendiquent et lorsque leur tribun chute, ses admirateurs partent en clandestinité comme s’il s’agissait du culte d’un dieu. Et plus étrange, l’Histoire regorgeant d’exemples des issues fatales qui ont suivi les règnes de tels personnages… le bégaiement se poursuit. La chute de l’homme fort et le monopole d’une tendance qui s’érode ne sont que les résultats de l’expression démocratique. Les dés sont jetés. Le peuple a voté. Rien ne sert d’épiloguer et pourtant l’épilogue nous est servi depuis presque une semaine, jusqu’à satiété et quel que soit le canton. Passons à autre chose, s’il ne fallait qu’une sentence pour terminer sur une bonne note, je proposerai la citation de Georges Clémenceau à la mort polémique du président français Félix Faure en 1899 « Il voulait être César, il ne fut que Pompée ». Denys Arcand dans Le déclin de l’empire américain, le cite aussi d’une délicieuse manière…