Opinion
Bonus encaissé auprès des maraichers, Coop abuse de sa position dominante

Jean-Pierre Grin, ancien conseiller national | Les maraîchers suisses sont en colère contre Coop qui a changé les conditions de ses contrats d’achat et qui percevra dès 2026 un bonus de 3 % sur le chiffre d’affaires de ses fournisseurs de légumes suisses. Les maraîchers vont faire encore une fois les frais d’une course aux prix les plus avantageux entre les grands distributeurs. Cette course aux profits qui, en plus, est favorisée par la position dominante des géants de la distribution va provoquer un manque à gagner de plus de 8 millions pour les producteurs de légumes. Il n’est pas acceptable que les deux grands distributeurs puissent continuer à se partager le marché suisse à 80 % sans être dérangés, tout en prélevant des marges bénéficiaires élevées et en déclarant régulièrement des bénéfices annuels énormes. Tout cela en partie sur le dos des producteurs. Ce nouveau système de ristournes, mis en place par Coop auprès de ses fournisseurs de légumes et fruits, pourrait mettre en péril la pérennité d’une agriculture durable qui fournit un approvisionnement indigène de qualité. Coop justifie ce prélèvement de 3 % grâce à son nouveau système informatique de commandes, basé sur l’intelligence artificielle, qui va permettre à ses fournisseurs d’être bien plus efficaces, ce qui sera aussi plus avantageux pour eux. Les producteurs en recevant les commandes finales plus tôt, ce qui leur confère une plus grande sécurité de planification et une plus grande efficacité en économisant des frais de transport.
Pour les producteurs au contraire ce ne sera pas des économies, mais plus de dépenses et un moyen comme un autre de « noyer le poisson » pour faire avaler à la branche une baisse de prix injustifiée. Ces bonus encaissés par Coop est un moyen de détourner les prix équitables fixés par les organisations professionnelles. D’autre part, ce programme piloté par l’IA permettra à Coop d’encore mieux calculer les prix et de dégager davantage de marges au détriment des producteurs. En 2023, la RTS a enquêté sur les marges de la grande distribution pour les produits alimentaires. Résultat : des aliments sont vendus entre 80-90 et même 100 % plus chers que ce qu’ils sont payés aux producteurs. Marché équitable suisse a déposé une plainte auprès de la commission de la concurrence ( COMCO ) pour abus de position dominante . Il serait , d’autre part , urgent de créer au niveau suisse , un observatoire des marges au niveau alimentaire pour avoir plus de transparence et éviter qu’à l’avenir l’on fasse mourir de faim celles et ceux qui par leur travail nourrissent la population.