Médiation
La Médiation est-elle un combat serein ?

On imagine souvent la médiation comme un lieu calme, feutré et presque doux. Pourtant, lorsqu’un conflit éclate, c’est bien l’image du combat qui apparait. Chacun campe sur ses positions, arguments à la main, prêt à défendre son point de vue. Lorsqu’on leur parle de médiation, certains s’interrogent, est-ce qu’on parle d’un vrai combat ou d’un simulacre de justice ? Peut-on vraiment se battre sereinement ?
Claire et Mathieu ont dirigé ensemble une entreprise familiale pendant vingt ans. Et puis, les tensions ont grandi à la suite de décisions prises sans la consultation de l’autre et de reproches laissés en suspens. Un jour, tout a éclaté et les deux associés ne se parlaient plus que par avocats interposés. Lorsqu’on leur proposa une médiation, Claire répondit qu’elle souhaitait un combat et que pour elle un combat serein cela n’existe pas.
Pourtant, ils sont venus me voir tous les deux, d’abord à reculons. Je leur ai alors expliqué que la médiation n’est pas un tribunal, c’est un lieu où l’on n’est pas là pour convaincre un juge, mais pour se parler, pour se dire les choses et pour écouter, parfois pour la première fois depuis longtemps. C’est un moment suspendu, où les règles du jeu changent et où l’on ose dire ce que l’on garde au fond de soi.
Ce que Claire et Mathieu ont découvert, c’est que la médiation n’est ni un affrontement, ni un face-à-face brutal, mais plutôt un pas de côté pour éviter un combat sanglant. Un espace neutre, où chacun peut exprimer ses attentes, ses blessures et ses propositions. Un endroit où l’on n’est plus dans le schéma gagnant-perdant, mais dans une recherche commune d’issue. Dans une salle de médiation, on n’y vient pas pour imposer une solution, mais pour en créer une.
Cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y a pas de tension. Bien sûr qu’il y en a, il s’agit d’un conflit. Mais au lieu de l’enfermer dans une logique de sanction, la médiation lui ouvre une issue. Elle transforme la confrontation en dialogue, l’opposition en compréhension. Elle ne gomme pas les différends, mais elle les rend traversables et parfois féconds.
Peut-on se défendre en médiation ? Oui. Peut-on y faire valoir ses droits ? Encore oui. Mais on le fait autrement et avec d’autres outils, tel que la parole, l’écoute active, la volonté d’avancer. En tant que médiateur, je ne suis pas là pour juger, mais pour permettre que la rencontre ait lieu et qu’elle devienne productive. J’accompagne et j’éclaire, mais ne tranche jamais à la place des personnes comme le fait un tribunal.
La médiation est parfois le seul endroit où l’on peut parler en son nom, sans être réduit à une position juridique. C’est un processus respectueux, volontaire, confidentiel et c’est cela qui le rend si puissant. Parce qu’il redonne aux personnes leur pouvoir d’agir, leur capacité à décider. Elle permet de sortir du conflit sans détruire le lien, de clore un différend sans alimenter la rancune.
Avec moi, Claire et Mathieu ont fini par trouver un accord. Ils ne sont pas redevenus amis, mais ils ont repris le fil de leur histoire commune avec dignité, sans vainqueur ou perdant. Surtout, ils ont gardé la possibilité de se reparler un jour.
Alors, la médiation est-elle un combat serein ? Peut-être, mais c’est surtout une voie humaine, apaisée et créative. Une alternative solide et concrète à l’escalade du conflit. Une solution pour aujourd’hui et souvent, une paix durable pour demain.