Minisérie de Shane Meadows

Colette Ramsauer  | Scénario, réalisation et interprétation baignés d’humanité font la minisérie du cinéaste anglais Shane Meadows et du co-scénariste Jack Torne. Empreints de l’esprit des films de Ken Loach dans une Angleterre défavorisée, après This is England en 2006, ils signent à nouveau un drame psychologique lié à l’enfance. S’inspirant de sa propre histoire, le réalisateur suit le parcours d’une vie brisée et mène à la conclusion de la vengeance ou du pardon. L’acteur Stephen Graham est bouleversant dans le rôle principal.

Flash-backs précurseurs

Ce jeune garçon qu’on voit courir à travers champs et forêts, c’est Joseph s’enfuyant de l’orphelinat. D’un passé dans l’Irlande très catholique des années 50, le film montre au long des épisodes des flash-backs en 8mm couleur, captures d’indices qui font penser au pire. En 2006, Joseph (Stephen Graham) la quarantaine, divorcé, déprimé, se réfugie dans l’alcool. Sa dépendance s’accentue alors qu’il est séparé de son fils de 9 ans, emmené par sa mère en Australie pour une vie meilleure avec un nouveau conjoint. Le film nous plonge dans la grisaille de la partie Nord de l’Angleterre et de celle des banlieues de Belfast. Celle des pubs glauques divertissant la population.

Sa sœur, unique lien

Joseph voulant en finir avec sa vie gâchée à Liverpool, décide d’un retour vers ses racines en Irlande où vit sa sœur mariée avec trois enfants, Anna (Helen Behan) qui le croit mort. Il ne l’a pas revue depuis qu’ils étaient enfants tout juste orphelins. Des circonstances floues avaient conclu à leur séparation. Les retrouvailles réservent quelques scènes émouvantes. Tel un phare dans le brouillard, les liens affectifs unissant la famille d’Anna demeure l’aspect positif du film.

Cheveu sur l’objectif

Dans la deuxième partie d’une odyssée peu banale, Shane Meadows superpose le drame d’une jeune femme, Dinah (Niamh Algar) débarquant comme un cheveu sur l’objectif. Une intervention qui prolonge trop les séquences du cinquième épisode. On aurait préféré en savoir plus sur le passé pour disparu de Jo et sur le refoulement de son enfance. Le stratagème du cinéaste est mis en lumière dans un dénouement tout en suspens, lorsque pour conclusion il fait la démonstration de la vengeance invraisemblable dont fait preuve la jeune femme, et de celle du pardon libérateur dont Joseph est capable.

Musique et interprétations remarquables

La BO de PJ Harvey, auteur compositrice anglaise de rock alternatif joue subtilement sur les flash-backs d’un passé refoulé. Les seconds rôles sont admirablement interprétés par, entre autres, les actrices Helen Behan (Anna, soeur de Joseph) et Niamh Algar (Dinah, belle-soeur d’Anna) « La performance de Stephen Graham dans « The Virtues » est tout simplement éblouissante. Le portrait brut d’un homme en proie avec son passé et ses propres démons est déchirant » a estimé le jury de Festival de Séries Mania à Lille en mars 2020, qui lui attribuait le premier prix d’interprétation masculine alors que la minisérie de Shane Meadows remportait celui de la meilleure réalisation.

« The Virtues » (Les Vertus) 2019, UK Minisérie en 4 épisodes 3 x 46 + 1 x 75 minutes

De Shane Meadows, avec Stephen Graham, Helen Behan, Niamh Algar, Mark O’Halloran - Musique de PJ Harvey

Personnes sensibles et jeune public s’abstenir.

Disponible gratuitement sur Arte, encore jusqu’au 30 décembre