Y a-t-il une limite à la durée de la vie humaine ?
Gérard Bourquenoud | Il existe des arbres plusieurs fois millénaires, des animaux centenaires, des baleines qui peuvent atteindre l’âge de 80 ans et des corbeaux près de 70 ans, alors qu’une souris ne trotte que trois ans, une mouche pas plus de trois jours et certains insectes à peine 24 heures. Par contre, des bactéries existent depuis des centaines de millions d’années, ce qui ne donne pas forcément envie de partager leur existence. C’est peu dire que le vivant est inégal devant la durée de vie.
Dans l’espèce humaine, il y a eu en France une icône qui se nommait Jeanne Clément et qui s’est éteinte à 122 ans en 1997, la plus longue durée humaine jamais attestée. Une Américaine est décédée récemment à l’âge de 116 ans sans avoir pu confirmer exactement sa date de naissance. Certains Suisses ont atteint 105 et même 110 ans. Un Gruérien du nom de Pierre Gremion, de Broc, s’est éteint à 108 ans. Alors qu’il n’était pas encore centenaire et encore très lucide, il faisait lui-même ses emplettes, son ménage et ses repas. Régulièrement, en Suisse romande, des centenaires (féminins et masculins) sont fêtés par les autorités cantonales. Et leur nombre va croissant depuis une décennie. Dans le canton de Fribourg, huit centenaires sur dix choisissent 100 bouteilles de vin des Faverges en lieu et place du traditionnel fauteuil qui, semble-t-il,
ne sert à plus rien à cet âge.
Il en est de même dans d’autres cantons. Et ce qui est quelque peu frappant, c’est que même les religieux, religieuses et moines des couvents préfèrent cette boisson qui remonte le moral.
Aujourd’hui, l’espérance de vie dépasse les 100 ans. On a même créé le terme de supercentenaires pour ceux et celles qui ont la chance ou la malchance d’atteindre un âge aussi honorable. Car devenir aussi vieux est agréable lorsque l’on peut encore bouger, marcher, manger soi-même, se coucher et s’habiller. Mais si vous êtes contraint à demeurer au lit ou dans un fauteuil ou une chaise roulante à attendre la mort, ce n’est pas le paradis. Y a-t-il une limite à la durée de vie d’un être vivant, et, si oui, laquelle? La question semble simple, mais évidemment, ce n’est qu’une apparence.
Il y a un demi-siècle, des savants affirmaient doctement qu’un homme ou une femme ne pourrait vivre plus de 75 ans, voire même 80 ans, pour ne pas dire 90 ans… A l’heure actuelle, rares sont ceux qui s’aventureraient à donner un nombre. Prenons l’exemple de notre pays voisin la France où, en 1750, seule la moitié des filles a atteint l’âge de 8 ans. Pour celles nées en 2000, la plupart devraient atteindre 80 à 85 ans. En 2100, elles pourraient vivre entre 90 et 105 ans. Bien sûr, la médecine fait des progrès aussi bien pour prévenir que pour soigner et même guérir.
La fin de vie n’est-elle pas une question d’usure de la «machine», et si la plupart des pièces ont été changées, viendra un moment où elle ne pourra plus fonctionner (?) Une machine qui est programmée dans une mystérieuse boîte noire qui, de toute façon, doit laisser la place à ses «rejetons». L’usure n’est pas la seule cause de la disparition de l’être humain, il y a également la vieillesse, une foule de maladies et d’accidents au quotidien qui ont pour effet de ravir des milliers de jeunes ou moins jeunes. D’autre part, des chercheurs ont avancé l’hypothèse, après études de nos ancêtres, que la longévité humaine évoluerait dans le temps. La nourriture va certainement jouer un rôle important d’ici le XXIIe siècle sur la durée de la vie. Que mangeront exactement les humains? Difficile de le dire, mais ce qui est certain, c’est que les aliments vont sans aucun doute encore évoluer et cela préoccupe bon nombre de peuples sur cette terre. Y aura-t-il suffisamment de blé, de légumes, de fruits, de viande, pour nourrir tous les humains de la planète?
Et comme l’évolution de l’alimentation nous amène vers une «bouffe» qui s’avère de plus en plus artificielle, les générations à venir auront du pain sur la planche pour tenter de vivre sans trop de craintes sur leur santé, laquelle risque même de raccourcir leur durée de vie. Et si toutefois celle-ci pouvait doubler, ou même tripler, la sagesse nous dit qu’il faudra certainement se faire une raison: l’immortalité restera réservée aux seuls immortels.