Mister-Bee, une histoire de passion
Gil. Colliard | Lors du Marché du Terroir de la Haute-Broye le 7 novembre dernier, parmi les produits proposés, un étal a attiré mon attention. Outre les pots de miel alléchants se trouvaient de mystérieuses petites bouteilles brunes dont l’étiquette indiquait «Apithérapie, teinture mère de propolis». Intriguée, je me suis adressée à «Mister Bee» comme le nommaient les cartes de visite posées sur la table. A l’écoute de ses explications, qui laissaient transparaître une réelle passion pour le monde fascinant de la ruche, il m’est venue l’idée d’en faire profiter nos lecteurs.
La passion des abeilles, c’est s’attacher à un insecte qui ne s’attache pas à vous
Ainsi donc, Bernard Pasquier, sa vive curiosité pour l’univers des ruches remonte à son enfance. A l’époque, il partageait ses moments de liberté avec l’ancien postier des Avants qui possédait des moutons et surtout des abeilles. Malgré un parcours professionnel sans relation avec l’apiculture, il a gardé et cultivé cet intérêt. Il y a 10 ans, il est passé aux actes avec la mise en activité de ses premières ruches à Blonay où il réside. C’est aujourd’hui un connaisseur averti qui préside la Société d’apiculture de la Haute-Broye. Reprenant la succession d’un ancien confrère, il compte actuellement une trentaine de boîtes bourdonnantes et colorées à Palézieux et aux Tavernes (communes d’Oron). En plein été, son cheptel représente 50’000 à 60’000 individus par colonie. Préparation des ruches en vue de l’essaimage printanier, lutte contre le varroa – cet acarien parasite originaire d’Asie –, extraction du miel en juin et fin juillet (en moyenne 20 kg par ruche), mise en bocaux et surtout observation lui prennent environ 15 minutes par ruche et par semaine.
La propolis, ce médicament naturel connu depuis les temps anciens
Curieux de nature, il s’est intéressé d’un peu plus près à une autre activité de ses amies ailées: la récolte de la propolis. Cette substance résineuse collectée par les abeilles ouvrières sur certains arbres (saules, bouleaux, peupliers, etc.) est amenée dans la ruche où un autre groupe d’abeilles lui ajoute certaines salives et la transforme en un mastic dont elles enduisent l’entrée de la ruche et les cadres afin de supprimer les courants d’air. Une couche pelliculaire est également déposée dans les alvéoles où les reines pondent les œufs. Cette même couche imperméable sert aussi à envelopper les déchets ou les cadavres trop importants pour être rejetés hors de la ruche. C’est ainsi que la colonie est protégée avec un produit antibactérien et antifongique. Connue depuis les temps les plus reculés pour ses vertus, la propolis était utilisée pour soigner les suppurations par les Grecs, et les Romains en enduisaient les blessures de leurs soldats. Des plaquettes du Moyen Age décrivent des préparations médicales à base de propolis pour les traitements des maladies de la bouche et de la respiration. Il semblerait même qu’elle aurait servi de vernis aux Stradivarius afin de leur donner un meilleur son et de les protéger contre le ver de bois.
Cette résine est ramassée moyennant le grattage des cadres ou en introduisant une grille à l’intérieur de la ruche que les abeilles se chargent de «propoliser». Après extraction des cires et des impuretés et dissolution dans une solution alcoolique, on obtient une teinture mère qui, en utilisation externe, a des propriétés antibiotiques importantes et étendues à de nombreuses souches microbiennes. Elle est cicatrisante par stimulation et accélération de la régénération tissulaire. C’est aussi un anesthésique et anti-inflammatoire non négligeable. Bernard Pasquier conditionne cette petite merveille de la nature en bouteilles de 20 ml. Cherchant un autre moyen d’application, il est en train de concocter une pommade qui devrait trouver sa formule en 2016.
C’est un vrai plaisir de l’écouter raconter ce monde si particulier qui le passionne: les rôles bien définis des abeilles en fonction de leurs âges, passant de nettoyeuses à nourrices pour devenir butineuses; la reine qui adapte sa ponte en fonction des besoins de la colonie, le faux-bourdon qui après avoir assuré la fécondation se fait exclure de la ruche l’automne venant. Mais il avertit que l’on ne peut pas se vouer à l’apiculture sans connaissances, ce serait courir à l’échec. Lui-même et la Société d’apiculture de la Haute-Broye se font un plaisir d’accueillir et de renseigner toute personne intéressée à devenir membre ami ou à se former en vue de démarrer cette activité.
Nous le retrouverons avec plaisir lors des éditions 2016 du Marché du Terroir de la Haute-Broye. En attendant, on peut obtenir son miel à la laiterie de Palézieux-Village.