Hommage à Pierre Guex-Borgeaud, mainteneur et défenseur du vieux langage vaudois
par Henri Niggeler | Les patoisants vaudois ont accompagné, pour un dernier ADieu, le 9 mai dernier, leur président d’honneur et fidèle mainteneur du vieux langage vaudois, le pasteur Pierre Guex, à la chapelle des Râpes de Vers-chez-les-Blanc.
Né à Carrouge le 19 août 1923, de cette haute terre du Jorat si fertile en patoisants, Pierre Guex a été, dès sa jeunesse, sensibilisé à notre vieux langage. Ce n’était pas sa langue maternelle, mais très tôt, il a entendu son grand-père Philippe Jordan devisant souvent dans cette langue, dont on lui avait prohibé l’usage durant sa scolarité. Il était aussi attentif à l’écoute d’un autre Carrougeois, Maurice Chappuis, qui fut aussi un mainteneur exemplaire. Durant ses études de théologie à la Faculté de Lausanne, il prit connaissance d’ouvrages relatifs au vieux parler vaudois, tout en s’initiant aussi au patois gruérien; il lira aussi avec intérêt des œuvres de l’abbé Brodard. Lors de la parution du Nouveau Conteur vaudois, en 1947, il fut au nombre de ses premiers lecteurs et abonnés. Ce mensuel lui parviendra durant toute la durée de son ministère. A sa retraite, à Vers-chez-les-Blanc, il mettra tous ses talents de linguiste au profit de l’Amicale de Savigny-Forel et de l’Association vaudoise des amis du patois, en participant à la commission du dictionnaire et en chantant aux côtés de Marthe dans les rangs des “Sansounet”. Il publiera de nombreuses plaquettes de poèmes et d’études, distinguées à plusieurs reprises par le Prix Kissling.
En 1995, il siégera au comité de l’association vaudoise, qu’il présidera dès 1998. Grâce à ses qualités de latiniste, d’helléniste ou d’hébraïsant, Pierre Guex traduira les Psaumes en patois vaudois, d’une manière telle qu’il est regrettable qu’une pareille publication ne vînt à paraître qu’à la fin du 20e siècle. Car, en effet, une telle traduction aurait certainement enrichi l’approche de ces Psaumes bibliques aux habitants de notre Pays de Vaud, dans ce langage qui était le leur, voici 200 ans.
Dans toutes ses traductions, Pierre Guex s’est appliqué à démontrer que notre patois vaudois n’était pas seulement le langage des gaudrioles et des gandoises, mais pouvait exprimer des pensées subtiles et de profondes réflexions philosophiques. Pour cet inlassable dévouement à la cause du vieux langage vaudois, les patoisants sont fiers et reconnaissants d’avoir côtoyé cet éminent mainteneur.
Benhirâo lo peuplyo que l’è dinse por li;
Benhirâo lo peuplyo que l’Èternè l’è son Diû.
Psaume 146, verset 15, traduit en patois vaudois