Argent de poche: dès quel âge, combien, pourquoi ?
Mathieu Janin | Smartphone, habits de marques, jeux vidéo, loisirs… nos enfants sont pris de plus en plus tôt dans les rouages de notre société consumériste. Un quart d’entre eux sont endettés dès 18 ans déjà, dont 8 sur 10 auprès de leurs parents. Une bonne raison pour l’APE-Jorat d’avoir organisé une conférence sur ce sujet à Mézières courant janvier.
Sylvie Pittet Blanchette, vice-présidente de la Fédération des associations de parents d’élèves de Suisse romande et du Tessin, a rencontré lundi dernier des parents d’élèves de notre région pour débattre de la question de l’argent de poche. Ces conférences-débats sont proposées aux parents par les trois partenaires du projet, la Fapert, Projuventute et l’Association pour la formation des parents.
Certains parents présents comptaient trouver une réponse claire aux trois questions récurrentes: Quand? Combien? et Pourquoi? servant d’intitulé à la conférence. Mais il en est de ce domaine comme de tous les éléments de l’éducation: si des réponses toutes faites existaient cela se saurait.
Sylvie Pittet Blanchette a joué cartes sur table dès l’entrée de jeu: «Il n’y a pas, en matière d’argent de poche, une seule et unique manière de faire qui serait la plus juste à l’exclusion des autres» a-
t-elle indiqué. Il s’agissait donc avant tout de présenter aux parents présents un éventail d’outils et de réflexions en la matière.
Pour Sylvie Pittet Blanchette, le premier message à transmettre aux parents concerne la nécessité de parler d’argent avec les enfants. «Ne serait-ce que pour expliquer qu’une carte de crédit n’est pas une baguette magique, mais que le pouvoir d’achat qu’elle offre dépend des revenus dont disposent papa et maman.» Chacun connaît dans son entourage un enfant qui a un jour imaginé qu’il suffisait d’aller au Bancomat pour que cet automate lui crache de l’argent. Les adultes savent que la réalité est plus complexe. Il est important que nos enfants en prennent conscience au travers du dialogue et de l’échange avec leurs parents. Les détails seront éclaircis au fur et à mesure que l’enfant grandit. De l’école enfantine, avec notamment l’apprentissage de la frustration, au premier salaire et à la prise d’autonomie qui en découle, le chemin est long et l’argent de poche devient un outil pour initier l’enfant à la valeur de l’argent et à sa gestion.
Une réponse claire
Si on adhère à cette idée, alors: Quand? Combien? Pourquoi? A ce moment de la soirée, les parents présents espéraient encore partir avec une réponse claire, rassurante et permettant de mettre fin aux négociations interminables avec leurs ados. «Quand ? » S’il n’y a pas de règle absolue en la matière, Sylvie Pittet Blanchette confirmait qu’il n’est pas nécessaire d’anticiper une demande de l’enfant. C’est quand commencent les sollicitations à la consommation que le sujet peut être abordé, «même lorsqu’il ne s’agit que d’achats de bonbons». Chez les petits en âge de scolarité primaire, son conseil est de proposer une petite somme chaque semaine, pour passer à un montant mensuel à l’entrée au secondaire. L’élément clé étant de se tenir à ce qui a été convenu au départ… sans rallonger la somme lorsque les supplications de notre rejeton deviennent insupportables. «Le premier endettement des jeunes est envers leur parents huit fois sur dix ! » insiste la vice-présidente de la FAPERT.
Etre cohérent
Combien? Question délicate, sachant qu’elle n’implique pas uniquement des valeurs éducatives, mais également des questions économiques. D’autre part, cette question est également liée à celle de «pour quoi?» A quoi sert l’argent de poche? La facture de téléphone portable doit-elle être comprise dans l’argent de poche? Le maquillage? Les habits? Les sorties au cinéma? Les livres? La musique? La benzine du vélomoteur?… Que sais-je encore? Là encore, chaque famille connaît ses propres règles. Mais l’importance d’établir un cadre et de s’y tenir une fois qu’il a été défini a été mise en évidence à plusieurs reprises lors du débat. Sylvie Pittet Blanchette a, par ailleurs, souligné «qu’une fois les règles du jeu établies, l’argent de poche appartient à l’enfant, il doit être donné régulièrement et ne devrait pas devenir un moyen de pression à l’usage des parents». La discussion et les échanges entre les parents, de ceux qui pensent que tout travail mérite salaire et ce faisant rétribuent de bon cœur les bonnes notes ou la présence à l’école, à ceux qui estiment qu’il sera bien assez tôt pour régler la question au moment du premier salaire, ont montré que les approches familiales sont fort diverses, voire parfois même divergentes.
Au final, on retiendra de cette soirée qu’il en est des questions d’argent comme de toutes les questions d’éducation: cadrer, dialoguer et être cohérents. «Nous ne devons pas oublier que nous sommes le premier modèle de nos enfants. A ce titre, peut-être vaut-il la peine, avant d’en parler avec eux, de nous
questionner sur notre propre rapport à l’argent» a conclu Sylvie Pittet Blanchette.
Infos: www.ape-jorat.ch
Liens utiles pour les enfants:
www.ciao.ch: Site de conseil romand où les enfants peuvent poser des questions. Le thème de l’argent de poche y est abordé.
www.147.ch: Le lien avec la ligne téléphonique d’aide destinée aux enfants.