Menaces terroristes contre les Jeux Olympiques de Sotchi ?
Par Laurent Vinatier | Fin décembre, à un mois environ de l’ouverture des Jeux Olympiques d’hiver de Sotchi, la Russie subit un double choc terroriste. Volgograd, une ville très au sud de Moscou, est frappée deux fois en son cœur: deux attentats-suicides, d’abord à la gare puis le lendemain dans un tramway, provoquant en tout la mort d’au moins 30 personnes civiles, des gens de tous les jours, qui se trouvaient là par hasard. Ceux-ci succèdent à une précédente attaque, dans un tramway également, survenue à la mi-octobre. Cette profusion macabre pointe naturellement vers la rébellion armée islamiste retranchée dans les montagnes du Caucase à la frontière de la Fédération, dont le leader, récemment, a justement appelé à tout faire pour empêcher la tenue des Jeux. Un lien existe sans aucun doute mais la réalité opérationnelle s’avère beaucoup plus complexe.
A y regarder de plus près, la valeur ajoutée de ces attentats pour ces rebelles est loin d’être évidente. On ne voit guère comment le fait de frapper en aveugle des civils dans des lieux publics porte atteinte à l’organisation olympique; d’autant que Volgograd se trouve quand même à presque 1000 kilomètres de Sotchi. Il ne faut pas non plus surestimer les forces de l’insurrection et ses capacités de coordination: compte tenu des pressions militaires russes, la prise de décision dans la montagne est très décentralisée. Les initiatives opérationnelles, en particulier les attentats-suicide, relèvent le plus souvent de la base, même dans certains cas d’individus isolés. Cela vaut pour Volgograd: les volontaires frappent où, quand et comme ils peuvent, sans être dirigés ou actionnés par un chef supérieur.
Il reste que les attentats de Volgograd sont un mauvais présage pour Sotchi. L’ultra-sécurisation de la ville cependant rend assez improbable, mais nullement impossible, ce type de désagrément. L’insurrection armée islamiste démontrerait alors une puissance de frappe inattendue, et pour le coup, bien préparée. Cela serait un acte de guerre, contrairement à ceux de Volgograd qui apparaissent plutôt comme un aveu de faiblesse. Quoi qu’il se passe, le choix de Sotchi par la Russie est depuis le début assez tendancieux et potentiellement dangereux. L’insurrection islamiste qui dure et se radicalise n’est qu’un aspect. Il faut aussi rappeler qu’il y a 150 ans pile, en 1864, d’autres rebelles contestant la colonisation tsariste, les ancêtres de ceux qui se battent actuellement, se faisaient massacrer par les Russes sur le plateau de Krasnaya Polyana, «la plaine rouge»… de sang… qui doit précisément accueillir en février les
festivités olympiques.