Canicule
Georges Pop | Pics inégalés de chaleur en Suisse et en France, feux de forêt dévastateurs au Portugal et dans l’Extrême-Orient russe, sécheresse en Chine etc.: l’Organisation météorologique mondiale (OMM) a multiplié les exemples il y a une semaine pour constater que la Terre connaissait une nouvelle année exceptionnellement chaude, avec des épisodes caniculaires en avance sur la saison. L’occasion de se pencher sur l’ascendance pour le moins surprenante du mot canicule. Ce terme qui définit une vague de chaleur accablante a été tout simplement emprunté au latin canicula, autrement dit petite chienne, diminutif du mot canis qui veut dire… chien! Pourquoi? Eh bien dans l’Antiquité, dès le mois de juillet et pendant plusieurs semaines, l’étoile Sirius, quatrième objet le plus brillant de notre ciel après le Soleil, la Lune et la planète Venus, se levait au petit matin en même temps que notre astre du jour. Les anciens étaient alors persuadés que l’apparition de Sirius à proximité du Soleil avait un lien avec l’arrivée des grandes chaleurs. Les Romains attribuaient en effet à Sirius une influence malfaisante et rendaient l’astre responsable de nombreuses maladies causées, pensaient-ils, par la chaleur qu’il stimulait par sa proximité apparente avec notre étoile. L’écrivain Pline l’Ancien écrivit ainsi à propos de Sirius: les effets de cet astre sont les plus puissants sur la terre: les mers bouillonnent à son lever, les vins fermentent dans les celliers et les eaux stagnantes s’agitent. Soit! Mais quel rapport avec le monde canin ? J’y viens: chez les anciens Grecs, Sirius s’appelait Kύων (Kúôn), le Chien. La constellation de cette brillante étoile prit du coup chez les Latins le non de Canis Major, autrement dit le Grand Chien, nom qu’elle porte encore de nos jours. La canicula des Romains définissait donc la chaude période allant du 24 juillet au 24 août. Elle commençait par la fête de Neptunalia, en l’honneur du Dieu de la mer, Neptune, à qui l’on demandait de combattre la mauvaise influence de Sirius en lui sacrifiant des chiens roux, de la couleur du soleil; puis elle s’achevait par la fête de Vulcania, en l’honneur de Vulcain, le dieu du feu que l’on était bien content de voir décamper. Aujourd’hui nous savons tous, à priori, que Sirius n’est pas responsable de nos canicules précoces. Sauf peut-être Donald Trump …